Après un scrutin verrouillé en amont et largement entaché par de vastes falsifications, l’association Russie-Libertés appelle la France et l’UE à ne pas reconnaître les résultats des “élections” législatives en Russie.
Après trois jours d’un scrutin verrouillé en amont par le Kremlin, la nuit du dimanche 19 septembre au lundi 20, a été marquée par un chaos total du dépouillement des votes des élections législatives en Russie.
Une nuit où les observateurs étaient intimidés, arrêtés, placés en garde à vue sans raison, tabassés et exclus des bureaux de vote. Les représentants des partis d’opposition devaient parfois défendre les urnes avec leur corps.
Cette nuit, le Kremlin devait clore avec brio son « Opération spéciale », comme la nomme la professeure Marie Mendras, pour se garantir une part confortable, mais en diminution, des sièges à la Douma, malgré des contestations nombreuses et un climat social tendu.
Ce scrutin a été marqué par de nombreuses fraudes : 4 973 (en hausse de 30% par rapport aux législatives de 2016) selon l’ONG Golos qui supervise les élections en Russie.Des soupçons planent sur plus de 10 millions de votes falsifiés, notamment au moment de la comptabilisation des votes en ligne et à domicile.
Les fraudes et pressions ont été diverses :
– arrestations et intimidations d’observateurs
– bourrages d’urnes
– dépouillements effectués à huis clos
– « Karousel » (des jeunes qui sont payés pour voter dans différents bureaux de votes à la fois)
– retardement des décomptes
– données masquées par un codage rendant leur exploitation impossible pour toute analyse par des experts
– certaines commissions électorales avaient tout simplement disparus sans annoncer les résultats
– le vote électronique a largement été utilisé dans les administrations publiques et les entreprises d’État par incitation via des tirages au sort ou des listings de contrôle, afin d’obliger les salariés et fonctionnaires à voter pour le parti du Kremlin
Le nouveau système de vote électronique à Moscou a vraisemblablement servi de « variable d’ajustement » pour falsifier le résultat des élections. Les données de celui-ci n’ont été communiquées qu’à 14h le lendemain, après qu’Elena Pamfilova, à la tête de la Commission Électorale russe, a ouvertement annoncé avoir consulté Vladimir Poutine.
Malgré des résultats affichés très favorables au parti en place, le vote contestataire a eu des effets non négligeables. En effet, grâce à la stratégie du « Vote intelligent » mise en place par Alexeï Navalny, et le contexte actuel en Russie, le score de “Russie-Unie” et de ses alliés a diminué . Cette stratégie consiste à orienter les électeurs vers tout autre parti que le parti au pouvoir afin de leur permettre de gagner des sièges et empêcher les candidats de Russie Unie d’avoir le monopole. Certains soupçonnent que le vote intelligent a été contré par une manipulation avérée des résultats du vote électronique.
Ainsi, à Moscou où après le décompte des bulletins de vote les partis d’opposition gagnaient la majorité des circonscriptions, une fois que les résultats du vote électronique ajoutés, la situation s’est radicalement inversée et le parti au pouvoir couvrait toutes les circonscriptions sans exceptions.
À gauche sans le vote électronique et, à droite, avec. En vert, les régions où les candidats du vote intelligent ont gagné et en bleu, où ce sont les candidats du parti au pouvoir.
Par conséquent, les partis d’opposition, notamment le parti communiste « KPRF » a appelé aux rassemblements dès le lendemain du vote et certains députés déclaraient ne pas reconnaître les résultats de ces législatives à Moscou. Des slogans tels que « Non aux répressions politiques » et « Russie sans Poutine » ont été scandés lors de ces rassemblements.
Le mouvement Golos a quant à lui déclaré qu’il ne reconnaît pas ces élections comme véritablement libres : « elles sont non conformes à la Constitution, ni aux lois de la Fédération de Russie et ni aux normes électorales internationales, puisque ces résultats ont été obtenus au cours d’une non-campagne électorale non libre et inégale, dans des conditions de restrictions à l’exercice du droit électoral d’un nombre important de citoyens. » (voir notre rapport sur le Verrouillage des élections) « De plus, les violations au cours du scrutin et du dépouillement, la procédure de vote en trois jours et la manière dont le dépouillement a été effectué, au cours duquel il y a eu une distorsion importante des résultats, ne permet pas de parler de la fiabilité des résultats affichés par le système des commissions électorales ».
Nous appelons la France et l’UE à ne pas reconnaître les résultats de ces élections et à exiger du pouvoir russe le respect de la Constitution et des lois de la Fédération de Russie, ainsi que le respect des normes électorales internationales pour garantir aux citoyens russes des élections justes et équitables.
https://desk-russie.eu/2021/09/10/operation-speciale-elections.html
https://www.golosinfo.org/articles/145498