“Mieux vaut passer 10 ans derrière les barreaux en restant un honnête homme que de brûler en silence dans la honte du sang que ce régime fait couler.” Ce sont les paroles de l’opposant russe Ilya Yashin depuis le Tribunal le jour de sa condamnation.
Ilya Yashin est l’un des hommes politiques d’opposition les plus en vue de Russie. Il a été membre du parti Iabloko, puis a cofondé le mouvement Solidarité avec Boris Nemtsov. Après le meurtre de Nemtsov, son collègue et ami, il a régulièrement critiqué Ramzan Kadyrov. En 2017, Ilya a été élu député du district municipal de Krasnoselsky à Moscou.
Le 12 juillet, une enquête pénale avait été ouverte à l’encontre d’Ilya Yashin pour diffusion de “fausses informations” sur l’armée russe motivée par la “haine politique” (en vertu de l’article 207.3(2) du code pénal russe). Les poursuites ont été engagées en raison de la diffusion par Yashin d’une vidéo sur YouTube dans laquelle il évoquait le massacre de civils par l’armée russe à Butcha.
Placé en détention provisoire depuis le 13 juillet par décision de justice pour désobéissance à des agents de police, l’homme politique a été condamné le 9 décembre 2022 à plus de 8 ans de prison pour son opposition à la guerre en Ukraine, pour avoir osé appeler la guerre une guerre et dire comment elle se déroule réellement.
Il s’agit de la plus sévère condamnation à ce jour (des 122 affaires pénales en cours) pour motif de diffusion de « fausses informations sur l’armée russe ».
La loi sur les “fausses informations sur l’armée russe” est manifestement anticonstitutionnelle – elle bafoue la liberté d’expression, la liberté de pensée et la liberté de recherche d’informations garanties par la Constitution russe. En outre, elle remet en cause le droit et la mission du député à pouvoir s’exprimer sur les questions politiques.
De toute évidence, l’affaire contre Yashin est politique. Les autorités ont lancé une répression massive contre quiconque ose critiquer leurs actions et surtout la guerre, afin d’intimider la société civile et de la réduire au silence. Il s’agit de briser toute forme de résistance. D’autres cas existent tels que celui d’Aleksei Gorinov, condamné à 7 ans de prison.
Nous demandons la libération d’Ilya et l’arrêt de toutes poursuites politiquement motivées contre lui. Nous demandons également la libération de tous les prisonniers politiques en Russie !
Soutenez Ilya Yashin, signez la pétition : http://chng.it/mD59vVt4Pz
Retourvez l’interview de Yashin après un mois d’emprisonnement dans Le Monde par Emmanuel Grynszpan publiée le 11/08/2022
Ilia Iachine, opposant russe emprisonné : « Les premiers signes du mécontentement de la population sont déjà visibles »
A 39 ans, ce compagnon de route d’Alexeï Navalny est l’un des rares leaders de l’opposition démocratique à n’avoir pas fui le pays. Il répond aux questions que « Le Monde » lui a transmises par l’intermédiaire de ses avocats.
Ilia Iachine, 39 ans, est l’un des rares leaders de l’opposition démocratique russe à n’avoir pas fui le pays. Il a été interpellé à Moscou, fin juin, sous des motifs fallacieux, après s’être engagé contre la guerre en Ukraine. Lundi 8 août, le tribunal municipal de Moscou a ordonné le maintien en maison d’arrêt, durant son procès, de ce compagnon de route d’Alexeï Navalny – déjà condamné et emprisonné – et de Boris Nemtsov, assassiné en 2015. Il risque désormais une peine allant jusqu’à quinze ans de prison. La procureure a exigé que l’audience se déroule à huis clos pour « ne pas permettre à Iachine de populariser ses opinions contre la guerre ». L’opposant, qui assistait à la séance de la prison par liaison vidéo, a exhibé une pancarte sur laquelle était inscrit le slogan « Non à la guerre » au moment où le tribunal a annoncé sa décision. Il répond aujourd’hui aux questions que Le Monde lui a transmises par l’intermédiaire de ses avocats.
Vous saviez que vous risquiez d’être emprisonné. Quelles mesures avez-vous prises pour votre sécurité personnelle, pour votre santé et pour vos proches ?
Je me suis préparé moralement. Il est très important de s’interroger honnêtement dans une telle situation : suis-je prêt à aller en prison pour mes convictions ? Il faut avoir une idée claire de ce qui vous attend, ne pas se faire d’illusions et ne pas être hanté par le doute. Le dissident soviétique Vladimir Boukovski, qui a connu les prisons et les camps, m’a expliqué un jour : « Si, avec de la volonté, tu parviens à supprimer cette peur, tu deviens pratiquement invulnérable pour le système. »
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